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Révérend
Blues Gang
Concert "le Plan (Ris-Orangis)"
3 avril 2004
par Manuto
Tel le péquenot de base qui déboule de son bled (Paris
quand même), j'arrive au Plan la guitare à l’épaule
en pensant que c'est un petit club, genre comme à la capitale,
et qu’il y aura peut-être un p’tit bœuf. Grossière
erreur. Je suis visiblement resté trop longtemps en Angleterre.
Comme j'ai trop longtemps arrêté de sortir en revenant d’Albion.
C'est une salle de concert. Et comble, en plus.
J'avais déjà croisé le Révérend à
l'Espace B de Christian Legras. D’abord à la fête de
la Chaîne du Blues 2003 où j’avais pu apprécier
la qualité de son toucher et de son son. Quelques semaines avant
la soirée du Plan, toujours chez Christian, il jouait avec le RBG
devant quelques amis, quinze-vingt, pas plus. Et je fus abasourdi par
le son du groupe, sa puissance, et la qualité de la performance
malgré l'auditoire…clairsemé.
Mais au Plan, le RBG enregistrait son album "live" doublé
d'un DVD. Tout le monde a donc mis le paquet. L'endroit, le groupe, les
invités, la prod et surtout le public... 500 personnes au bas-mot,
prêtes à en prendre plein les oreilles.
C'est d'ailleurs ce qui va se passer. Car ce qui frappe d'entrée,
c'est le mur du son.
Claff et Anthony Delannoy d'une part qui, au contraire de beaucoup d’autres
rythmiques, ne se contentent pas de planter des clous. Ils suivent, poussent
derrière et verrouillent quand il le faut, ne laissant pas de répit
aux guitaristes qu’ils soutiennent. De véritables propulseurs
sonores.
Et puis il y a les guitaristes. Trois, 3 (1+1+1)... c'est énorme.
A droite, statuesque dans ses riffs, Pat Baldran déroule. Classe
naturelle. A gauche, Mick « Red Bull » Ravassat, la dernière
recrue. Un p’tit nerveux avec une gueule souriante qui plaît
aux gonzesses. Il trépigne comme un pois sauteur épileptique.
Sûr de son fait, il a l’air d’avoir été
toujours là.
Et puis au centre, The Man Himself. Le Révérend boit du
petit lait... Il sait que la soirée est à lui. Il sait qu’il
n’y aura pas de place pour l’ennui. Ce soir encore moins que
les autres soirs. Les membres du groupe sont à un moment-clé,
où ils voient leur histoire prendre forme sous leurs yeux. Si pendant
des années, il n’y a eu qu’eux pour y croire, ce soir,
c’est différent… Ils sont chez eux au Plan et les gens
qui sont venus sont avec eux, pour eux. Ils croient en eux.
Le Révérend en est d’ailleurs assez ému pour
remercier son public d’une façon touchante pour un gars dont
le look pourrait laisser penser que l’homme est un peu bourru au
départ. Que non. Il a un gros coeur, le Révérend.
Et il y met tout le monde dedans, comme il le dira lui-même.
Les prestations des invités apportent des breaks intéressants
dans un set déjà surpuissant : encore plus de blues avec
Little Magic Sam à l’harmonica, un funk soul au taquet avec
Juan Rozoff (toujours à fond, toujours trop bon…) et même
un peu de trash décadent avec Lord Tracy (Jesus Volt), qui alla
jusqu’à prendre « Red Bull » pour une glace à
la fraise. Mais c’est vrai que lui-même semblait être
déjà assez chocolat…
Le moment le plus fort pour moi fut le morceau de Bill Perry, "Fade
To Blue". C’est à ce moment précis que j’ai
réalisé l’ampleur sonore du RBG. Le riff stonien joué
à l’unisson par les trois guitaristes donne au groupe une
largeur tout à fait particulière.
Je ne suis pas resté à l’afterparty où tout
le monde était convié, public compris. J’étais
sonné et j’avais les oreilles qui sifflaient (c’est
vrai que sur la fin, les stacks Marshalls étaient un peu à
11), j’avais besoin de silence pour revoir le spectacle dans ma
tête. Je voulais prolonger cette impression d’avoir partagé
un moment particulier dans la vie d’un groupe. C’était
un concert particulier.
Car au-delà des divergences de styles, c’est surtout la générosité
de ce groupe qui reste dans ma tête, leur capacité à
pouvoir délivrer leur musique avec puissance et sans arrière-pensée.
Cela vaut toutes les chapelles. Well done.
Manuto
http://www.manuto.net
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